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- Rédigé Par MenouActu Suivre @MenouActu
- Mis a jour 08/05/23 à 11:47
Le journaliste en retrait et enseignant chercheur à l'université de Dschang, Alexandre T Djimeli s'exprime sur la question de pénalisation des délis de presse. Voici quelques morceaux choisis de sa longue et riche intervention dans un aparté accordé au
au journaliste Michel Ferdinand du quotidien Mutation.
« On parle en général de dépénalisation mais je m’appesantis sur la peine privative de liberté qui, pour moi, est l’aspect qui fait véritablement problème».
Pour l'enseignant chercheur les journalistes ne bénéficient pas des mêmes faveurs que les autres corps de métiers :
« Dès que le journaliste ou l'animateur pose à l'occasion de son travail un acte préjudiciable aux tiers, la clameur publique crie au scandale....Parmi ceux réclament leurs têtes, il y en a qui ne seraient pas seulement coupables (si on les jugeait) de contravention ou de délit, mais de crimes lorsqu'on regarde la réalité de leurs pratiques quotidiennes en situation professionnelle...Combien de fois a-t-on vu jeter sans façon en prison : un administrateur civil qui a pris une décision ayant fait chuter un secteur d’activités dans une unité administrative, un médecin qui a raté un diagnostic clinique, un professeur qui a effectué une démonstration erronée, un inspecteur des impôts qui a trop fait payer un contribuable....Pourtant, dès qu’il s’agit des professionnels des médias, nombreux sont ceux qui revendiquent leur mise en détention quand ils commettent une erreur pouvant être qualifiée comme contravention ou comme délit.»
D'après le journaliste en retrait cet acharnement est justifié par le fait que :
« Les médias se positionnent en effet dans la société comme un contre-pouvoir...Ils surveillent notamment le judiciaire, l’exécutif et le législatif. Ils livrent les éventuels faits de mal gouvernance de ces derniers au tribunal de la conscience individuelle et collective...Les choses sont ordonnées de sorte que, ces trois (pouvoir ndlr) semblent s’organiser pour «maîtriser» les moyens de communication de masse et ceux qui les animent.»
Raison pour laquelle : « il faut museler les journalistes et auxiliaires pour préserver des avantages sauvegarder des intérêts, conserver une position au sein de l’appareil d’État...la voie royale de ce bâillonnement, semble-t-il, c’est l’application régulière de la peine privative de liberté.»
Pour lui, les hommes de médias ne gagneront pas ce combat de si tôt car :
« il serait utopique de penser que les journalistes auraient de si tôt gain de cause dans le combat pour la suppression de la peine privative de liberté telle qu’elle est inscrite dans le dispositif de contrôle des médias. Il s’agit d’une lutte de longue haleine dont l’issue dépendra de la capacité des professionnels des médias à faire valoir les spécificités de leurs métiers et à les faire prendre en compte».
Mais le journaliste estime que magistrats et les avocats peuvent accompagner ce combat :
« Il apparaît de notre point de vue que les avocats et les magistrats ont une clé de résolution du problème. Ce sont en effet les magistrats qui rendent les décisions de justice qui, soit envoient les journalistes en prison, soit les relaxent ou relâchent. Les avocats, quant à eux, travaillent à la manifestation de la vérité afin que les jugements soient davantage éclairés.»
« Qui ne se souvient des plaidoiries de Me Charles Tchoungang qui, au début des années 1980, mirent Me Icaré à la retraite, dans une affaire de délit de presse qui engageait la liberté du journal Le Messager et de Pius Njawe ? Face aux arguments juridiquement bien articulés du jeune avocat, le juge prononça la relaxe pure et simple de Pius.»
L' enseignant chercheur souhaite aussi que les parlementaires arrêtent de jouer aux ami(e)s hypocrites des journalistes pour lui, « L’on espère de véritables plaidoyers auprès de ceux qui ont l’initiative des lois : les parlementaires – les députés de la nation surtout – et le Président de la République. Il ne faut pas seulement que les parlementaires se pavanent et s’affichent dans la rue avec les journalistes dont ils estiment être les amis; il est responsable qu'ils accompagnent ce combat en faisant sauter le verrou de l’emprisonnement ici indexé.»
Il invite enfin les professionnels de médias à faire également plus d'efforts.
« les professionnels des médias, permanemment dans l'œil du cyclone, doivent défendre leurs intérêts de toutes leurs forces. Cela commence par une solidarité ferme dans toutes les épreuves qui engagent les métiers des médias...C’est probablement dans le cadre de structures solides d’autorégulation, créées et animées par les professionnels eux-mêmes, que les médias se feront mieux valoir. La survie et l’ennoblissement des métiers des médias en dépendent !»
Cyrille De Fopossi pour le journal citoyen MenouActu
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