1er octobre : une date historique négligée au Cameroun, malgré la crise anglophone

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  • Rédigé Par MenouActu    


  • Mis a jour 02/10/24 à 13:16

Le 1er octobre devrait être une journée gravée dans la mémoire de chaque Camerounais, une date phare marquant l'unité, l’indépendance et la souveraineté nationale. En 1961, ce jour a vu la naissance de la République fédérale du Cameroun, issue de la


réunification du Cameroun français et du Southern Cameroon britannique. C'est aussi la date où l’indépendance du Cameroun-Occidental fut proclamée, scellant la fusion des deux territoires. Le 20 octobre de la même année, le premier gouvernement fédéral fut mis en place, jetant les bases de l’unité et de la cohabitation de deux peuples aux histoires coloniales distinctes.


Cependant, cette date, qui devrait figurer parmi les événements nationaux majeurs, est aujourd'hui reléguée aux oubliettes. Le 1er octobre passe incognito, sans cérémonies officielles ni rappels dans les médias ou les écoles. Comme un anniversaire oublié, cet événement, qui symbolise l’unité du Cameroun, est désormais ignoré. Comment expliquer une telle négligence envers une journée aussi symbolique ? Comment bâtir un avenir solide si l’on efface les traces de notre passé ?


Cette indifférence devient encore plus préoccupante lorsque l'on considère la situation actuelle du pays. Depuis 2016, le Cameroun fait face à une crise profonde qui secoue principalement ses régions anglophones. Nos compatriotes d’expression anglaise, qui faisaient partie intégrante de cette réunification historique, expriment aujourd’hui un sentiment croissant de marginalisation, exacerbant des revendications sécessionnistes. Comme une plaie laissée sans soin, cette crise s’enracine dans des griefs économiques, politiques et culturels non résolus, liés à l’injustice perçue depuis la réunification.


Le 1er octobre aurait dû être un symbole vivant de cette unité nationale, un pont entre les différentes communautés du pays. Mais à force d'ignorer cette date, le Cameroun exacerbe les divisions internes, en particulier dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, épicentres du conflit. Le manque de reconnaissance de cette journée renforce l’idée, chez les populations anglophones, qu’elles sont mises à l’écart et que leur histoire, tout comme leur contribution à la construction du pays, est marginalisée.


Aujourd'hui, cette crise n’a pas seulement des répercussions sur les zones de conflit direct. Elle se fait ressentir bien au-delà, notamment dans le département de la Menoua et, en particulier, dans la ville de Dschang. Comme un incendie qui, attisé par les vents, consume des régions éloignées, la crise anglophone frappe de plein fouet cette localité, autrefois réputée pour sa tranquillité et son rôle d’interface entre les deux Camerouns. La proximité géographique de Dschang avec les zones anglophones, combinée à la vague de déplacés fuyant les violences, a transformé la ville en une zone d’accueil pour de nombreuses familles touchées par le conflit.


La Menoua, jadis perçue comme une région tampon entre les deux systèmes, est désormais en première ligne des conséquences sociales et économiques de la guerre. Les populations locales doivent composer avec un afflux massif de personnes déplacées, qui, elles-mêmes, apportent avec elles les traumatismes et les blessures de cette guerre. L’économie locale, autrefois stable, subit le contrecoup des troubles dans les régions voisines, avec la fermeture de routes commerciales importantes et la baisse des activités économiques.


Dschang, autrefois carrefour universitaire et centre culturel, est devenu un point de passage et de refuge pour ceux qui fuient la violence. Les tensions y sont palpables, comme un baromètre qui reflète les pressions exercées par la guerre dans les régions anglophones. Cette crise a accentué la précarité dans le département de la Menoua, affectant non seulement la cohésion sociale mais également le tissu économique et éducatif de la région. Les infrastructures locales, déjà limitées, peinent à répondre aux besoins croissants des déplacés internes et des populations locales qui voient leurs ressources diminuer.


Cette situation met en lumière l'urgence de restaurer la mémoire collective autour du 1er octobre, non seulement pour les régions anglophones, mais pour tout le Cameroun. Comme un arbre dont les racines se dessèchent progressivement, un pays qui oublie ses fondements risque de s’effondrer. En rappelant le sens de cette journée, en la célébrant comme il se doit, le Cameroun pourrait réaffirmer son engagement envers l’unité et le respect de la diversité. Cette réhabilitation de la mémoire collective pourrait être un premier pas vers une réconciliation nécessaire.


Il est crucial que les autorités camerounaises reconnaissent l’importance de cette date. Le 1er octobre doit redevenir un symbole de la promesse faite à l’unité nationale. En réhabilitant cette journée dans les cœurs et les esprits, nous pourrions commencer à guérir les blessures profondes causées par la crise anglophone. C'est en accordant à cette date historique l'attention qu'elle mérite que le Cameroun pourra réaffirmer son désir de paix et d'unité, non seulement pour le passé, mais pour l'avenir.


Le Cameroun est à un carrefour de son histoire. L'oubli du 1er octobre est une erreur que nous ne pouvons plus nous permettre. Il est temps de reconnaître cette journée pour ce qu'elle est : une célébration de l'unité, de la souveraineté et de l’indépendance. En rétablissant cette date dans nos mémoires collectives, nous pourrions enfin construire une nation forte, fondée sur la reconnaissance mutuelle et le respect de nos histoires partagées. Le 1er octobre ne doit plus jamais passer inaperçu.


Par Blaise ETONGTEK pour le journal citoyen MenouActu

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