Dschang : 10 jours se sont écoulés sans lumière.

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  • Rédigé Par MenouActu    


  • Mis a jour 22/09/24 à 10:09

Depuis le 13 septembre de cette année 2024, la commune de Dschang, comme plusieurs autres villes du département de la Menoua sont paralysées par une coupure d’électricité prolongée. Poissonneries, boucheries et ménages en détresse depuis lors.


Vendredi 13 septembre 2024,  une coupure d’électricité sans précédent plonge la commune de Dschang et tout le département de la Menoua dans l’obscurité totale. Cela fait maintenant plusieurs jours que les habitants, commerçants et entreprises sont privés d’un service essentiel à leur quotidien. Si cette coupure touche tous les secteurs d’activité, les conséquences sont particulièrement désastreuses pour les poissonneries, les boucheries, les petits commerces et les ménages. Cette situation a transformé la vie de milliers de personnes, entraînant des pertes économiques majeures, des dangers sanitaires et une détérioration profonde des conditions de vie.


Des poissonneries en ruine : des tonnes de poissons jetés. 

Les poissonneries de Dschang vivent une tragédie quotidienne depuis que la coupure d’électricité a débuté. En temps normal, les congélateurs permettent de conserver les poissons pendant plusieurs jours, mais sans électricité, ces appareils sont devenus inutiles. Résultat : des milliers de kilogrammes de poissons se gâtent en un temps record, obligeant les commerçants à jeter leurs marchandises à perte.

HERVÉ FOTSO , un poissonnier du marché B de Dschang, est à bout de nerfs. « Tous mes poissons sont pourris. Chaque jour, je suis obligé de les jeter à la poubelle. Ce que je vis est catastrophique. J’ai déjà perdu près de 2 000 000 francs CFA en quelques jours. Je ne sais plus quoi faire. Si cette situation continue, je vais devoir fermer mon commerce et trouver un autre travail », explique-t-il avec une voix remplie de désespoir. 

Comme Hervé, de nombreux poissonniers sont confrontés à cette même situation. Les poissons non vendus s’entassent dans les bacs, dégageant une odeur insupportable qui attire les mouches. Les clients, effrayés par les risques sanitaires, désertent les étals. Rosalie Dongmo, une cliente habituelle du marché, raconte : « Je suis venue acheter du poisson, mais tout est avarié. Je ne peux pas prendre de risques avec mes enfants. Cette situation est vraiment grave, et personne ne semble faire quoi que ce soit pour nous aider. »

Les boucheries en détresse : une viande invendable

Les boucheries ne sont pas épargnées par cette coupure qui affecte également leur capacité à conserver la viande. En l’absence de réfrigération, la viande tourne rapidement, forçant les bouchers à vendre à des prix dérisoires, ou pire, à jeter les produits invendables.

PIERRE MBIATCHA, boucher depuis plus de 20 ans à Dschang, est confronté à la pire crise de sa carrière. « Je ne peux plus stocker de viande. Ce que je mets à l’étal tourne au bout de quelques heures. Les clients n’achètent plus, et je dois tout jeter. Ça fait plusieurs jours que je perds de l’argent. En une semaine, j’ai déjà perdu plus de 600 000 francs CFA, et cela continue. Je ne sais plus comment nourrir ma famille. »

Les pertes financières sont énormes, et les commerçants ne voient pas d’issue à court terme. Certains bouchers tentent de vendre leurs produits à des prix très bas pour limiter la casse, mais même avec des promotions, les clients sont méfiants. « Personne ne veut acheter de la viande qui n’est pas bien conservée. Je comprends mes clients, mais cela me ruine », ajoute Pierre Mbiatcha.

Conséquences pour les ménages : une vie quotidienne chamboulée

Dans les ménages, les conséquences de cette coupure d’électricité sont tout aussi dramatiques. Les familles, habituées à conserver leurs aliments frais dans leurs réfrigérateurs, doivent désormais se contenter de produits secs ou en conserve. 

SYLVIE NGASSA , mère de trois enfants, partage son quotidien bouleversé : « Nous ne pouvons plus garder de la viande ou des légumes frais. Les enfants se plaignent parce qu’ils sont habitués à boire du lait frais, mais maintenant, nous devons tout acheter au jour le jour, et ce n’est pas toujours facile de trouver des produits de qualité. »

De nombreuses familles de Dschang sont contraintes de revoir leur alimentation. Le poisson frais et la viande sont devenus des denrées rares, et les prix de certains produits de base ont augmenté, rendant la vie encore plus difficile. Les plats préparés à base de conserves ou d’aliments secs sont devenus le quotidien de nombreux ménages, entraînant une diminution de la qualité nutritionnelle des repas.

Cette coupure affecte également l’eau potable. Les forages, qui fonctionnent à l’électricité, sont à l’arrêt, obligeant les habitants à parcourir de longues distances pour trouver de l’eau. « Chaque matin, je dois marcher plus de deux kilomètres pour chercher de l’eau dans un puits. C’est épuisant, surtout avec cette chaleur », témoigne Etienne Mboua, un habitant de Dschang.

Les petits commerces et activités connexes en crise

Outre les poissonneries et boucheries, de nombreux autres petits commerces sont affectés par cette crise énergétique. Les épiceries, les BARS et Snacks bars et les vendeurs de produits laitiers perdent également de grosses quantités de marchandises à cause de l’absence de réfrigération.

 PAULINE FONKOU, qui tient une petite épicerie à Dschang, explique : « Mon lait, mes yaourts, tout est perdu. Je ne peux plus vendre de boissons fraîches. Chaque jour, je compte mes pertes. Si l’électricité ne revient pas rapidement, je vais devoir fermer. »

Les autres secteurs d’activité sont également touchés. Les tailleurs ne peuvent plus utiliser leurs machines à coudre, les soudeurs sont à l’arrêt, et les entreprises de photographie, photocopies et reproduction sont fermées. 

SAMUEL NGANJE, un réparateur de téléphones, témoigne de l’impact sur son travail : « Depuis que l’électricité est coupée, je ne peux plus travailler. Mes clients ont besoin que je recharge leurs téléphones, mais sans électricité, c’est impossible. Je perds beaucoup d’argent chaque jour. »

Les activités connexes liées à l’alimentation, comme les vendeurs ambulants et les petits restaurateurs, sont également à l’arrêt. « Nous dépendons des poissonneries et boucheries pour nos plats. Sans viande ni poisson frais, nous ne pouvons plus cuisiner pour nos clients. C’est une situation insoutenable », déclare THÉRÈSE NLEMBA, une restauratrice situé au niveau de la maison Blanche.

Les solutions locales : la solidarité s’organise

Face à cette situation dramatique, certaines initiatives locales émergent pour tenter de limiter les dégâts. Des habitants et commerçants s’organisent pour louer ou acheter des groupes électrogènes. HERVÉ FOTSO , le poissonnier, explique comment il essaie de sauver ses affaires : « Nous avons cotisé avec d’autres commerçants pour louer un groupe électrogène, mais cela ne fonctionne que quelques heures par jour. Ce n’est pas suffisant, mais au moins, cela nous permet de garder quelques produits. »

De même, certains bouchers, comme Pierre Mbiatcha, ont décidé de regrouper leurs marchandises dans des espaces réfrigérés collectifs pour limiter les pertes. « Nous avons décidé de mettre nos viandes ensemble dans un seul congélateur qui fonctionne avec un groupe électrogène. Cela ne sauve pas tout, mais c’est mieux que rien. »

Des appels à la solidarité sont également lancés dans les quartiers, où certains habitants partagent l’électricité de leurs groupes électrogènes avec leurs voisins pour permettre aux plus démunis de conserver un minimum de nourriture. « C’est un moment difficile pour tout le monde, mais nous devons nous entraider », conclut Sylvie Ngassa.

Malgré ces efforts locaux, la situation reste critique. Les habitants et commerçants de Dschang espèrent un retour rapide de l’électricité, car sans cela, la ville risque de sombrer dans une crise encore plus grave, tant sur le plan économique que social.

Pour le journal citoyen MenouActu, BLAISE ETONGTEK

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